L’ascenseur social n’est pas en panne, il change de moteur
Social & Démographie
En France, nous croyons en l’ascension sociale par le mérite, le travail et l’accompagnement. C’est une caractéristique du modèle français : l’égalité des chances ! Cette conviction fait partie de notre pacte républicain.
Mais derrière le principe, la réalité est plus nuancée.
Alors, y a-t-il encore un ascenseur social ?
La réponse est oui. Il ne s’est pas arrêté, il se transforme. Il n’est plus linéaire, il change de formes, de moteurs, de rythmes selon les individus et sous l’impulsion de la révolution technologique. Il faut cesser de répéter qu’il serait « en panne ». Ce discours défaitiste masque les efforts réels, les réussites concrètes – et les leviers d’action à renforcer.
L’école reste un levier fondamental.
La CCI Paris Île-de-France assume une mission de service public au service de l’économie. Elle a fondé, au fil des décennies, une quinzaine d’écoles pour répondre aux besoins des entreprises. Ces établissements, bien que privés, fonctionnent sur des modèles non lucratifs. Ils sont des lieux de savoirs, d’apprentissage et d’accélération de parcours.
Chaque année, notre groupe éducatif accueille 45 000 étudiants, dont une part croissante vient de milieux modestes. Nous formons 16 400 apprentis, du CAP au bac+5. Et pour tous, nous avons mis en place des dispositifs concrets d’égalité des chances.
Nos écoles de commerce – HEC, ESCP, ESSEC – comptent 20 % de boursiers, avec des exonérations partielles ou totales des frais de scolarité. Des programmes comme CAP ESSEC, Talent Spring, ou encore HEC Stand Up pour les femmes entrepreneures, permettent de briser des plafonds invisibles.
À Gobelins Paris, nous participons aux « Cordées de la réussite » pour accompagner des lycéens dans leur orientation. Et à la Coding Factory de Cergy, une étudiante comme Aya Aidouni prouve que ces dispositifs changent des vies : elle vient de recevoir le prix Margaret Junior qui valorise les talents féminins dans l’IA. Des trajectoires comme celle-ci incarnent l’ascenseur social à l’œuvre.
Mais l’école ne peut pas tout. L’ascension sociale suppose aussi un moteur collectif : celui des entreprises qui peut jouer un rôle complémentaire dans la mobilité sociale.
Notre rôle à la CCI Paris Ile-de-France est d’accompagner ces entreprises pour qu’elles deviennent des actrices engagées de la mobilité sociale. Nous agissons à travers :
- La sensibilisation à la diversité des recrutements,
- L’aide à l’accueil de jeunes en alternance ou en stage,
- Le soutien à l’entrepreneuriat local, notamment dans les quartiers populaires.
C’est dans cet esprit que nous avons lancé « Né sous la même étoile », un programme qui met en lien jeunes issus de quartiers et chefs d’entreprise, via des rencontres inspirantes, des stages, du mentorat. L’objectif est clair, s’engager, donner le coup de pouce qui peut tout changer et révéler ainsi les talents invisibles.
L’égalité des chances ne se décrète pas, elle se construit.
Si je suis engagé dans les chambres de commerce depuis des décennies, c’est parce que je sais, pour l’avoir vécu, qu’un jeune qui doute de lui-même est un talent que la société peut perdre. Notre responsabilité est de faire tomber les barrières, de transmettre la confiance, de créer des déclics. Car pour fabriquer des entrepreneurs, il faut d’abord permettre aux jeunes de croire en leurs rêves.
C’est dans ce même esprit que j’ai créé le Moovjee sur le principe du mentorat pour jeunes et les étudiants entrepreneurs qui doivent pouvoir profiter de l’expérience d’autres entrepreneurs pour grandir, ne pas être seul et éviter les écueils. J’avais été conquis par le modèle du mentorat d’entreprise au Québec et je l’ai, pourrait-on dire, importé en France avec la création de l’Institut du mentorat entrepreneurial en 2008 (IME )par la CCI Paris que je présidais à l’époque.
Oui, en France, l’ascenseur social fonctionne encore. Mais il exige des efforts collectifs, une volonté politique constante, et des actions de terrain coordonnées. Lorsque l’on voit ce qui se passe actuellement aux Etats-Unis avec l’administration Trump qui suspend les financements des grandes universités sur des sujets d’inclusion, on voit que l’indépendance académique et l’accès équitable à l’éducation peuvent être remises en cause pour des raisons politiques. À la CCI Paris Île-de-France, nous sommes convaincus que la formation, l’entrepreneuriat et l’accompagnement dans un esprit de service public et d’inclusion sont les moteurs les plus puissants de l’ascenseur social.